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"DESSINS": BERNADETTE DROUILLOT, BENOÎT GOLLÉTY, NADINE DE KOENIGSWARTER, DIANA QUINBY
9 mars - 15 avril 2017
Depuis plusieurs années, à l’arrivée du printemps, Paris fête le dessin. Du croquis ancien jusqu’aux pratiques
contemporaines, ils se trouvent tous à l’honneur au Salon du Dessin au Palais Brongniart, au Salon Drawing Now ou
encore à D Dessin. C’est ce que je nommerais le « printemps du dessin », et pour cette année 2017, Arnaud Lefebvre
a choisi de montrer, dans sa galerie, les Å“uvres de Bernadette Drouillot, de Benoit Golléty, de Nadine de
KÅ“nigswarter et de moi-même, Diana Quinby. Cette exposition ne cherche pas à défendre une approche particulière
du dessin mais à faire cohabiter, pendant quelques semaines, les Å“uvres de quatre artistes pour lesquels le dessin
est le moyen d’expression privilégié. Pour chacun de nous, la nécessité du trait et du support papier est apparente,
et ce qui pourrait paraître comme une certaine austérité commune à nos Å“uvres relève, me semble-t-il, de la
recherche de l’essentiel.
Les dessins que présente Bernadette Drouillot se révèlent au regard comme une danse des mains, un langage de
signes rythmé par le geste, le trait et la couleur. C’est comme si l’artiste avait laissé l’empreinte de sa main en
dentelle sur la feuille, incarnée par des traits fins et souples qui rendent vivante la matière composée de fils
entrecroisés. Dessinée au feutre noir ou couleur, la dentelle est une sorte de peau où se trament la féminité et la
sensualité, la douceur et la caresse. L’ensemble de ces dessins constituent deux séries : les Ouvrages de Dames et
Les Mudras. Dans cette dernière, les doigts interprètent les positions du « Yoga des mains » ; dans les Ouvrages, ils
expriment les gestes de la pratique du crochet en tenant ou en tirant un fil. Adepte de ces deux pratiques, l’artiste
a constaté les similarités dans les gestes. En les dessinant, elle les relit entre elles et donne forme à sa recherche
personnelle d’apaisement et d’équilibre intérieur. Elle s’oublie dans le processus répétitif et méditatif du geste;
le parcours de la main et du trait élaborent une forme d’écriture qui trace le fil d’une idée autant que le fil de la
vie. Le geste devient l’incarnation même de l’énergie vitale et créatrice.
Figurer la présence du corps par le biais du trait constitue l’essentiel de ma pratique. Avec le crayon, outil de
précision, outil de l’écriture aussi, je fouille et j’ausculte, je raconte une histoire de la peau. Dans mes dessins de
corps nus, souvent plus grands que nature, les mains sont dotées d’une présence particulière. Si les gestes incarnés
de Bernadette Drouillot respirent d’une grâce quasi aérienne, les mains que je dessine expriment une certaine
lourdeur charnelle ; elles sont parfois osseuses, creusées de rides ou de veines, ou recouvertes de poils. Elles sont
poignantes dans leur expressivité et peuvent tenir lieu du visage. Pour l’exposition ici à la galerie, j’ai tenté de
faire des dessins aux formats réduits, de faire ressentir le corps entier en ne montrant qu’un fragment. J’ai tenté
aussi d’aller plus loin dans la multiplication de traits, d’approfondir la densité de gris et de presque-noirs. Dans
l’un de ces dessins, j’ai choisi d’omettre les mains pour voir si je pouvais suggérer l’émotion à partir d’une
topographie graphique de la chair.
« Dans mon monde fantastique, dans mon monde ludique, il y a toujours l’animal ». Nadine de Kœnigswarter dit
qu’elle est particulièrement touchée par cette phrase de Carole Rama. La présence animale dans ses dessins récents
leur confère la dimension magique d’un conte de fée personnel ou d’un lieu naturel enchanté. Dans un grand dessin
essentiellement abstrait, le réseau de traits et de points suggère des constellations d’une phosphorescence
radieuse. Dans Apparition, un chien aux poils longs, assis sur un sol en damier, regarde vers le ciel noir; il semble
attendre fidèlement le signe de son maître pour le rejoindre dans la voûte céleste. La luminosité des traits dans
les deux dessins provient d’un processus de grattage: avec l’aide d’un burin, l’artiste gratte la surface du papier
préalablement recouverte de couches successives de craie grasse. En enlevant de la matière, elle retrouve le
support, fait émerger le dessin du noir. Dans le monde fantastique de Nadine de KÅ“nigswarter, dans l’ensemble de
sa pratique, la recherche de la lumière se révèle dans les approches multiples de l’inscription du trait.
La pratique de Benoit Golléty semble pousser les limites du dessin à son paroxysme en interrogeant la nature
même du trait au graphite sur papier. Au mur de la galerie se trouvent deux dessins à peine perceptibles, entourés
d’amples marges blanches dans leur cadre. L’intimité des formats et le vide apparent de l’espace pictural invite
le visiteur à s’approcher. L’œil commence à distinguer quelques traits et griffures, à différencier les nuances de
gris. La subtilité du dessin confère à chacun des gestes une signification plastique considérable: les traits et leur
emplacement sur la feuille, leur densité ou leur légèreté, sont comme les mots d’un poème. Leur sens, leur sonorité
et leur place parmi d’autres mots doivent être justes. De même, la feuille de papier constitue un élément actif de
l’ensemble: sa blancheur, sa texture sont révélées par les traits au graphite, et ses bords, coupés net ou déchirés
à la règle, dessinent des lignes qui peuvent délimiter l’espace pictural ou, au contraire, suggérer son prolongement
au-delà de la feuille. Les travaux de Benoit Golléty nous rappellent l’infini des possibles du crayon sur papier et
acheminent le regard vers un espace de contemplation.
DIANA QUINBY
Dans le cadre du finissage de l’exposition DESSINS
Intervention des artistes
DIANA QUINBY BENOIT GOLLETY
mercredi 12 avril 2017 à 19h (voir les vidéos en cliquant sur les noms)
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Exhibit Images
"Dessins" vue d'exposition
Vernissage "Dessins"
Vernissage "Dessins"
Vernissage "Dessins"
Vernissage "Dessins"
Vernissage "Dessins"
"Dessins" mur de gauche en entrant (Bernadette Drouillot, Nadine de KÅ“nigswarter et Diana Quinby)
"Dessins" mur de droite en entrant (Nadine de Kœnigswarter, Benoît Golléty)
Bernadette Drouillot
6 dessins au feutre pigmentaire avec réhauts de blanc sur papier, 24 x 18 cm.
"XIIII - Ouvrage de Dames, geste 1" (vert), 2016
"XIIII - Ouvrage de Dames, geste 2" (noir), 2016
"XIIII - Ouvrage de Dames, geste 3" (ocre rouge), 2016
"XIIII - Mudrâ Jnana Chin" (vert), 2016
"XIIII - Mudrâ Ardhapataka" (noir), 2016
"XIIII - Mudrâ Gyan" (ocre rouge), 2016
Bernadette Drouillot
"XIIII - Mudrâ Jnana Chin", 2016
Dessin au feutre pigmentaire de couleur verte et réhauts de blanc sur papier dessin, encadré, 24 x 18 cm.
Nadine de KÅ“nigswar ter
[sans titre], 2015
Pastel à l’huile sur papier, encadré sous verre, 23 x 29,5 cm.
Diana Quinby
"Couple 2", 2016, lavis et graphite sur papier, encadré sous verre, 56 x 76cm.
Diana Quinby
"Couple 8", 2017, lavis et graphite sur papier, encadré sous verre, 56 x 76cm.
Diana Quinby
"Couple 7", 2017, crayon graphite sur papier, 98 x 82 cm.
Nadine de KÅ“nigswarter
[sans titre], 2016, 2 pastels à l’huile sur papier, 23 x 29,5 cm chaque.
Nadine de KÅ“nigswarter
[sans titre], 2016, pastel à l’huile sur papier, encadré sous verre, 99 x 69 cm.
Nadine de KÅ“nigswarter
"Apparition", 2016, pastel à l’huile sur papier, encadré sous verre, 29 x 22 cm.
Nadine de KÅ“nigswarter
[sans titre], 2016, pastel à l’huile sur papier, 23 x 29,5 cm.
Benoît Golléty
[sans titre], 2016
crayon sur papier, encadré sous verre, 18,6 x 14,8 cm.
Benoît Golléty
[sans titre], 2016
crayon sur papier, encadré sous verre, 10 x 17 cm. |